Travailler Pour La Vie

14 ottobre 2014

Etablis à Barcelone, les designers Alberto Lievore, Jeannette Altherr et Manel Molina ont fondé le studio de design Lievore Altherr Molina en 1991. Depuis lors, ils ont collaboré avec des organisations du monde entier dans des domaines variés: conception de produits, conseil, direction artistique. En 1999, Lievore Altherr Molina commence à travailler avec Arper, concevant certains produits phares de la société, dont la collection Leaf, Catifa et, l’an dernier, Saya. Les designers partagent ici leurs réflexions, avec en toile de fond leurs dernières nouveautés: Colina et Zinta.

© Marco Covi

De quelle manière pensez-vous qu’un environnement guide et façonne la vie qu’il contient?
Nous sommes fermement convaincus que l’ambiance d’un espace, l’agencement de ses éléments et de ses meubles, influent sur notre perception des choses, sur notre comportement. Cette réflexion ne concerne pas seulement notre domicile ou notre espace de travail, elle est valable pour tous les types d’environnements: écoles, universités, bibliothèques, hôpitaux, aéroports. Un lieu peut aider à guérir, à enseigner, à se détendre, à se concentrer, à se réunir. C’est un système de structures sociales, une façon d’organiser, une convergence de bruits, de température, de lumière, d’architecture et d’objets. Les meubles constituent les éléments de l’environnement les plus proches du corps.L’être humain s’identifie fortement aux objets. 

En quoi les réflexions relatives à la vie personnelle et au travail sont-elles liées? Les exigences pour le travail et pour la vie privée sont-elles différentes?
Ce point fait l’objet de discussions permanentes entre Arper et notre bureau; il nous renvoie à l’esprit du temps.

Nous parlons très souvent de l’absence de limites claires entre ces deux notions: où finit le travail? où commence la vie privée? Pourquoi considère- t-on la complexité de la conception comme un travail? Pourquoi n’en va-t-il pas de même pour la complexité de la vie de famille? Que signifie travailler nos relations ou travailler sur nous-mêmes? Quel est ce fossé?
Notre espace de travail a énormément évolué au cours de ces 20 dernières années. Nous ne travaillons plus sur une vraie table mais sur une immense «table» virtuelle: le réseau de nos ordinateurs. Nous n’avons plus besoin d’être physiquement ensemble dans un laps de temps bien défini. Cette souplesse nous permet de constamment passer de notre vie privée à notre vie professionnelle: une réunion avec un client, puis un coup de fil personnel, un évènement organisé par une école, suivi de la lecture d’un article intéressant dont nous pouvons débattre avec nos collègues, tout en corrigeant un prototype. De la même manière, nos observations et nos expériences influent constamment notre façon de concevoir. Nos vies nourrissent et inspirent notre travail. Travailler, ce n’est juste avoir un emploi. Vie privée et travail sont… non pas identiques mais indivisibles.

© Marco Covi

Quel rôle joue Internet dans cet amalgame travail-vie privée?
Avec l’évolution d’Internet, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, nous sommes désormais en mesure d’être constamment connectés, capables d’intervenir en différents lieux géographiques et zones horaires. De nombreuses activités professionnelles telles que resauter sur Facebook, répondre à ses emails, chercher l’inspiration sur des blogs ou sur Pinterest peuvent facilement se faire depuis la maison. Cependant, une telle souplesse exige un meilleur usage de la technologie. Cette dernière doit nous aider à mieux gérer nos vies, pas d’en devenir esclaves.

Faut-il considérer les ordinateurs portables et les téléphones mobiles comme des moyens de mieux équilibrer travail et vie privée ou nous condamnent-ils au contraire à être joignables en permanence? Répondre au téléphone à minuit est-il révélateur de notre efficacité ou de notre incapacité à ‘décrocher’? Sommesnous capables de nous limiter? Est-ce même nécessaire? En quoi ces changements ont-ils affecté votre façon de concevoir et vos relations de travail?
De plus en plus de monde travaille de la même manière que nous. Cette manière de travailler, toute en fluidité, typique du monde de la création, est en passe de devenir un modèle pour beaucoup d’autres entreprises. Nos relations s’axent sur la communication. Le système hiérarchique est remis à plat: les méthodes de travail ne cherchent pas tant le leader capable de résoudre les problèmes que de développer des projets grâce à un travail d’équipe. Les nouvelles générations ne veulent pas vivre pour travailler, mais plutôt travailler pour vivre. Elles sont à la recherche d’un plus grand équilibre entre les deux, de plus de fluidité. La frontière entre le travail et la vie privée s’estompe. Beaucoup choisissent de travailler en ne distinguant plus vie professionnelle et vie familiale de manière aussi stricte qu’avant. C’est une approche que nous soutenons depuis longtemps et que nous cherchons à transmettre à traversnotre design: esthétique et beauté, utilité, souplesse, expression et signification, tous ces aspects sont essentiels en matière de meubles et d’espace, aussi bien dans sa vie professionnelle que personnelle. C’est pourquoi nous continuons à concevoir des ambiances professionnelles et du mobilier toujours plus adaptables, fluides et chaleureux. En réalité, nous travaillons avec Arper sur cette idée d’un environnement de travail flexible et de soft contract depuis la toute première collection; ce n’est que récemment que ce concept est devenu une tendance dominante. Catifa a évolué en un système extrêmement souple, fort d’un réel succès, parce que sa silhouette est l’équilibre même entre d’un côté, une grande souplesse permettant de travailler à domicile, et de l’autre, une grande technicité lui permettant d’être utilisée dans des ambiances contract. Cette idée du ‘soft tech’ a également inspiré nos autres collections, qui en sont un exemple clair.


© Marco Covi

Vous travaillez depuis longtemps avec Arper. En quoi cette nouvelle dynamique travail/vie privée a-t-elle influé votre travail de conception pour Arper?
En ce qui concerne Arper, ces changements signifient que nous n’avons pas à établir des catégories telles que ‘meubles pour la maison’ ou ‘meubles pour bureaux’. Vie privée et vie professionnelle se déroulent en un même espace et parfois, au même moment. Nous allons au-delà de la simple fonctionnalité: nous voulons que notre environnement fonctionne et qu’il signifie quelque chose. Nous considérons notre environnement comme le miroir de nos idéaux et de nos aspirations. Nous sommes à la recherche de cette réflexion de nousmêmes non seulement à la maison mais également dans tous les autres espaces où nous évoluons. Chaque espace est une histoire, et chaque partie est un petit bout de cette histoire. Cela suppose que le meuble a une personnalité, capable de s’intégrer à nos contextes individuels. L’homme cherche à s’exprimer à travers ses choix, en modulant sa voix, par exemple à travers une palette diversifiée de finitions.

Quel but cherchiez-vous à atteindre en concevant vos deux nouvelles collections pour Arper – Colina et Zinta?
Les deux nouvelles collections que nous présentons pour Arper cette année visent tout particulièrement des situations de rencontre, de connexion et de communication, non pas autour d’une table, mais en étant confortablement assis dans un salon. Ces pièces peuvent parfaitement être utilisées lors de réunions amicales, placées dans un salon d’hôtel, offrant ainsi une pause propice à un coup de fil personnel ou professionnel, ou mises à la disposition de vos clients dans vos bureaux. Quelle qu’elle soit, la communication exige une certaine attitude d’ouverture, de générosité, de fluidité, de capacité à écouter l’autre, à lui répondre. Les deux collections conçues pour Arper cherchent à créer cette attitude propice à la communication.

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